Vers un vendredi noir ?

À 11h00, le Parlement du Kosovo débute sa deuxième séance de l’année. Unique point à l’ordre du jour, l’élection du nouveau président. Un seul candidat s’est présenté pour le poste, Hashim Thaçi. L’ancien premier-ministre et actuel ministre des Affaires étrangères entend gravir la plus haute marche de l’état kosovar. Nul ne lui enlèvera sa « récompense » pour les années de services qu’il a accomplies pour le Kosovo.

La pièce est écrite d’avance [1]. L’élection du président se 80 des 120 députés. Hashim Thaçi n’aura, sans doute, pas les 80 voix nécessaires. Pour qu’il soit élu, 80 députés doivent voter au premier tour pour atteindre le quorum. L’élection du président se fait à bulletin secret. L’opposition appelle à boycotter le vote. Mais même sans eux, il reste encore 90 députés dans la salle et le quorum est atteint.

La coalition gouvernementale a 79 députés. Les 35 députés du Parti Démocratique du Kosovo (PDK) sont bien décidés à élire leur Président de parti à la tête de l’état. Mais certains des 33 députés de la Ligue Démocratique du Kosovo (LDK) ont décidé de ne pas voter en faveur de Thaçi et de ne pas respecter l’accord gouvernemental signé entre le PDK et la LDK. Le chef de la LDK et l’actuel premier-ministre Isa Mustafa a appelé, hier soir, les députés LDK a respecté l’accord qui lui a permis d’avoir le poste de premier-ministre. En cas de non-élection de Thaçi au poste de président, le Parlement serait dissous et le pays lancera de nouvelles élections. S’il n’est pas certain que tous les députés LDK votent en faveur de Thaçi, il suffit aux quelques renégats d’être présents pour que Thaçi soit élu. Mais Hashim Thaçi a aussi besoin du soutien des 11 députés de la Liste Serbe. Leur soutien à Hashim Thaçi n’est pas certain. Les médias rapportent que Thaçi aurait eu un entretien avec Marko Djuric, ministre du gouvernement de Serbie pour le Kosovo. Thaçi aurait-il demandé au premier-ministre serbe Aleksandar Vucic de l’aider à recueillir les voix de la Liste serbe, parti piloté par Belgrade ? Seule la séance parlementaire nous le dira. Il reste les 6 députés des autres minorités ainsi que les 4 députés indépendants dont certains sont proches de Thaçi. Si Hashim Thaçi n’obtient pas les 80 voix dans les 2 premiers tours, au 3ème tour, la constitution du Kosovo prévoit que le président soit élu à la majorité +1. Si tout se passe comme prévu, Hashim Thaçi est élu.

Devant le Parlement, l’opposition campe depuis plusieurs jours et plusieurs nuits. Continuant a réclamé des élections anticipées, elle s’oppose à l’élection de Thaçi à la tête du pays. L’élection de Thaçi se fait dans un climat de grande tension. Les forces de police ainsi que les forces d’Eulex se sont amassées à Prishtina. De plus, des snipers se sont positionnés sur les toits à proximités du parlement. Sans compter que des partisans de Thaçi sont venus de Skenderaj, fief de Thaçi, pour fêter son élection.

Dans cette tension, l’élection de Thaçi pourrait être le commencement d’une guerre civile pour le jeune état du Kosovo, qui a fêté ses 8 ans le 17 février dernier.


Notes :
[1] Un autre candidat a été proposé par la députée PDK Ganimete Musliu. Il s’agit de Rafet Rama, un inconnu qui a été conseiller du ministère de l’intérieur. Plus tard durant la séance, la députée Ganimete Musliu retire sa proposition car la mère de Rafet Rama « lui aurait demandé de voter pour Hashim Thaçi ».